Frère(s) des Dragons

Une fantaisie homo sur des thèmes érotiques, par François Peneaud & Carlos García

Du mot à la page

Nous nous sommes dit que vous apprécieriez peut-être de voir comment Carlos et moi avons travaillé. Nous n’avions jamais travaillé ensemble avant Frère des Dragons, et donc, pour les 6 pages du prologues, Carlos a travaillé par étapes pour s’assurer que nous étions sur la même longueur d’onde. Nous avons choisi de vous montrer comment la page 5 du prologue est devenue ce qu’elle est.
Tout commence bien sûr par le script, que voici (il a été écrit en anglais, je vous en propose donc une traduction) :

Case 1 (large)
L’aubergiste et Jiki sont en train de jouir. Jiki sur la poitrine d’Adaï, l’aubergiste sur le visage de Jiki. Beaucoup de bruit et de plaisir.
Nous voyons Jiki de derrière, alors qu’il jouit. En bas de son dos, un petit tatouage est apparu et commence à luire légèrement en rouge. C’est une aile genre chauve-souris, avec un cercle à côté. Il ne faut pas attirer l’attention sur ce tatouage. Il faut seulement l’inclure de façon discrète dans l’image.

Case 2
Les trois hommes, encore nus, sont près d’un genre d’évier dans l’étable. Jiki se lave le visage avec un linge (son tatouage a disparu), et Adaï fait de même pour sa poitrine. Il rougit.

AUBERGISTE (souriant): Ton jeune ami est une sacrée trouvaille.
JIKI: Il ferait un bon cocher. Il aime les rarks.

Case 3
Ils sont tous les trois habillés, et retournent à la diligence. Les autres passagers discutent et sont en train d’y monter. L’aubergiste sert la main d’Adaï.

AUBERGISTE: Au revoir, Adaï. Tu seras toujours le bienvenu dans mon auberge.
ADAÏ: Merci, je m’en souviendrai.

Case 4
Adaï monte dans la diligence. Les rarks sont attelés.
L’aubergiste sert Jiki dans ces bras.

AUBERGISTE: Reviens vite.
JIKI: Oui. Tu vas me manquer, Boran.

Case 5
Jiki est à sa place en haut de la diligence. L’aubergiste se tient à côté de la diligence. Adaï le regarde en souriant. Les yeux de Jiki commencent à rougeoyer, de la même façon que son tatouage.

AUBERGISTE: Et toi aussi, jeune homme. Tu promets beaucoup.
JIKI (pas très fort, en ne parlant à personne): Oui, effectivement.

Et maintenant, la mise en page que m’a envoyée Carlos :

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Comme vous pouvez le voir, Carlos est resté très fidèle à mes descriptions, mais a décidé de mettre en avant la première case où tout le monde jouit. Je n’avais rien contre. Voici les crayonnés :

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Il me semble intéressant de remarquer que Carlos a déjà modifié certaines choses, comme la position de Jiki dans la dernière case. Elle est plus frappante, et attire l’œil du lecteur vers son expression. Ensuite vinrent les dialogues et les couleurs :

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De merveilleuses couleurs chaudes (le rouge de la première case n’a pas été choisi au hasard, soit dit en passant). On devrait avoir fini, n’est-ce pas ? Mais Carlos est le genre d’artiste qui n’est pas facilement satisfait de son travail, et il a décidé de redessiner le prologue tout entier. La version ci-dessus est ce que nous avons montré à notre éditeur canadien, Class Comics, quand nous leur avons proposé la série, mais les pages que j’ai postées sur ce blog sont la version définitive que vous trouverez dans la BD. Voici donc les trois étapes de cette version améliorée :

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Vous le voyez, le style est un peu plus réaliste (en particulier pour l’aubergiste), et des cases ont été ajoutées. Quand j’ai compris que Carlos aimait les pages denses (ou du moins, plus denses que ce à quoi je m’attendais), j’ai commencé à utiliser plus de cases dans mes scripts pour les chapitres suivants. Vous en aurez un peu plus pour votre argent ! J’apprécie aussi beaucoup les nouveaux choix faits par Carlos, comme dans la dernière case. Ne montrer que la moitié du visage de Jiki est vraiment frappant, il me semble - et bien sûr, ça permet à Carlos de rajouter une case au dernier rang. La plus grande profondeur de la première case est quelque chose que j’ai vu apparaître de plus en plus dans le travail de Carlos. Celui-ci n’a pas réalisé beaucoup de pages de BD pour l’instant, mais il y réfléchit déjà beaucoup. Heureusement pour sa main, Carlos n’est pas passé par autant d’étapes pour toutes les pages de la BD. Une fois que vous avons compris que nous étions bien sur la même longueur d’onde pour la narration, il a arrêté de me montrer la mise en page et est passé directement aux crayonnés. Et voilà l’histoire vraie de la création de Frère des Dragons.

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